Charles à Salonique
Cette lettre a été écrite par un soldat à une jeune fille du Bouissou. Nous ne connaissons que le prénom de l'auteur.
Salonique 26 nov. 1915
Ma très chérie,
Je t’ai écrit hier. Mais en rentrant cette nuit j’ai écrit à ton intention des vers sur la ville étrange qui vit sous nos yeux. Les voici, frais pondus, avec l’espoir, que comme les œufs, ils devront plus de saveur à leur jeunesse.
Salonique
En vain j’ai
parcouru la ville orientale
Où les grands minarets lèvent leurs doigts tremblants
En vain j’ai recherché l’ombre de la vestale
Assise auprès du feu dans ses vêtements blancs.
L’Histoire
n’a laissé sur la terre ancestrale
Que des ruines sans nom sur de vieux murs branlants
Iliade ou Coran, de tous vos chants troublants
Tout a sombré déjà dans l’immense rafale.
Pourtant, non loin
d’ici, Ménélas et Paris
Jetèrent au combat deux grands peuples en armes
Pour savoir qui d’Hélène aurait un jour les charmes.
Zeus, alors sut donner
au plus juste le prix.
Les peuples aujourd’hui recommencent l’histoire.
Dieu pourrait-il donner aux méchants la victoire ?
Je t’embrasse Ninou très tendrement
Ton Charles