Nous sommes maintenant dans le Choeur, face au retable.
Les deux murs latéraux du choeur, avec leurs ouvertures romanes, entre la sacristie et les deux chapelles latérales, sont, avec le pignon Ouest, les derniers vestiges de l'église primitive.
L'abbé Bouissou relève, qu'au dessous des fenêtres romanes, deux bancs de pierre étaient encastrés dans le mur, faisant fonction de stalles pour le clergé.
Le banc de droite aurait été démoli lors de la construction de la nouvelle sacristie en 1825 pour mettre "le pavé de la chapelle" au niveau du plancher de la sacristie. Le banc de gauche a également disparu, sans doute au début du XXème siècle.
Le retable qui occupe toute la superficie du pignon Est a déjà été évoqué ici.
Dans le style baroque le plus pur, il a été à l'évidence exécuté "sur mesure" pour notre église.
L'ensemble, polychrome à dominante d'or, est en bon état de conservation et mériterait à coup sûr, un éclairage adapté.
Quelques spots bien placés feraient certainement mieux apparaître les détails de sa riche architecture avec ses deux colonnes torses, ses pots à feu, ses angelots, ses entrelacs et ses enroulements de pampres et de lierre.
Le retable, dans lequel il faut inclure l'ancien autel surmonté du tabernacle, est d'une grande élégance.
Manque au-dessus du beau tabernacle le grand crucifix dont nous avons parlé. Il est maintenant remplacé, au centre du retable, par un tableau représentant la Crucifixion sur le Golgotha.
Ce grand tableau, très sombre, presque opaque, appelle une sérieuse restauration. Il serait l'oeuvre, selon Léonce Bouyssou, auteur d'un récent ouvrage sur les retables du Cantal, du peintre F. Castel qu a réalisé entre 1770 et 1784 de nombreux tableaux religieux dans les églises de la Châtaigneraie, notamment à St Mamet, Marcolès et Quézac.
De part et d'autre du tableau, deux grandes statues. Au Nord, celle de St Pierre, patron de l'abbaye fondatrice ; au Sud, la statue de St Illide, en habits d'évêque officiant.
A plusieurs reprises, nous nous sommes interrogés sur la date de réalisation du retable, sachant que beaucoup remontent au XVIIIème, voire au XVIIème siècle.
Léonce Bouyssou présente, dans son livre de 1991, plusieurs dizaines de très beaux retables des églises du Cantal.
Malheureusement, elle n'a pas jugé le retable de St Illide suffisamment remarquable pour en présenter la photo et le décrire.
Elle se borne à en mentionner l'existence et à le dater, sans autre précision, du XVIIIème siècle.
Les archives de la Fabrique permettent de corriger légèrement cette datation.
On sait, en effet, que le retable a été réalisé un peu après 1810, par Terrisse, sculpteur et statuaire à Aurillac. On se souvient que "Le Grand Christ et la Gloire du Père Eternel" a été payé 300 francs en 1815. Le dernier réglement pour solde du "retable du maître autel", d'un montant de 400 francs (environ 6.000 euros) date de 1818. Le paiement de la dorure est de la même année pour une somme de 600 francs.
Mais les comptes détaillés du curé Bru, en conflit avec les consuls au début du XVIIIème siècle, nous apprennent qu'il avait déjà installé un retable en 1711. Il s'agissait cette fois d'un retable peint, "figuré, en couleurs" derrière la table d'autel, donc à l'emplacement du retable actuel.
On ignore le sujet de ce décor, mais on sait qu'il était l'oeuvre du "Sieur Fabry, peintre" qui a réalisé pour notre église d'autres tableaux. Ce peintre est un artiste local majeur dont quelques tableaux sont encore visibles dans plusieurs églises autour d'Aurillac.
A St Illide, plus rien ne subsiste des décors, tableaux, tentures et statues financés par le curé Bru de 1706 à 1722. Tout a disparu, sans doute détruit ou volé, à la Révolution mais aussi après, aux XIXème et XXème siècles.
La sacristie actuelle a été construite en 1825 dans l'exact prolongement du choeur de l'église primitive.
La Fabrique recense cette année là diverses factures payées pour cette construction, aux maçon, forgeron, charpentier, couvreur, etc.
On accède au local par deux belles portes de style Louis XV situées de part et d'autre du maître autel. La porte Nord est condamnée.
La sacristie est habillée sur trois faces, sauf à l'ouest, de grands placards destinés à recevoir le linge et les ornements sacerdotaux, les calices, ciboires et autres objets liturgiques dont quelques uns seront évoqués au chapitre consacré au mobilier de l'église.
Sinon, la sacristie est un quadrilatère qui ne présente pas d'intérêt architectural.
Ce qui mérite attention est davantage les souvenirs qu'elle porte depuis près de 200 ans. C'est là que curés et vicaires, au fil des années, ont préparé et achevé leur messe quotidienne, entourés les dimanches des enfants de choeur, sacristains et Suisses, sans oublier les "menettes" dont nous reparlerons ; c'est là qu'ils ont reçu les confidences de leurs paroissiens ; c'est là que chaque année depuis le XIVème siècle, l'évêque de St Flour se préparait avant de confirmer les petits Miraliers...
Deux événements récents ont donné le relief de l'Histoire à notre sacristie.
C'est d'abord la découverte dans les années 80 par le curé Rezongles, dans les combles au dessus de la sacristie, de plusieurs objets liturgiques en métal précieux, cachés là sans doute depuis la Révolution ou lors des conflits liés au schisme de la petite Eglise, au début du XIXème siècle.
C'est, beaucoup plus récemment, la découverte par un artisan qui travaillait à la réfection du plancher, de plusieurs dizaines de pièces de monnaie à l'effigie presque effacée par l'usure. Certaines portent le profil de Louis XVI, d'autres datent de la Révolution, de l'Empire ou du début du XXème siècle.
Menu trésor, reliquat des quêtes que les curés avaient conservé là puis oublié...
La question importante au sujet de la sacristie est de savoir où elle se situait avant 1825.
Car il y avait forcément une sacristie, comme dans toutes les églises, pour les besoins du rituel et des offices. Le curé Bru, d'ailleurs, en parle lorsqu'il mentionne les dépenses faites en 1714 pour les "vitres" de la sacristie.
On se souvient (voir architecture extérieure I et II) que, jusqu'au début du XVIIIème siècle, les moines empruntaient l'escalier à vis construit dans une tourelle accolée au clocher pour atteindre le niveau de l'église, qui était leur chapelle prieurale, puis, au dessus, le clocher.
Plus tard, cet accès ne sera plus nécessaire, il n'y a plus de moines. La tourelle peut donc être désaffectée, puis démolie, sans doute vers 1750 ou un peu plus tard (Rochemonteix suggère 1793). A cette date, l'accès au clocher se fait de l'intérieur de l'église, le faîtage a été rehaussé.
Mais la sacristie est toujours là, forcément à la sortie de la tourelle, sur la face Sud de l'édifice, à l'aplomb du clocher, c'est à dire dans la première chapelle, celle incluse dans le choeur.
Un indice, apparemment ténu, vient étayer cette hypothèse : c'est la présence bien visible sur le mur extérieur, près de la fenêtre romane, à hauteur et dans le prolongement d'une pierre d'évier qui devait se trouver à l'intérieur, d'un petit orifice d'évacuation d'eau, creusé dans la pierre.
Il faut, en effet, rincer les objets liturgiques, les vases, se laver les mains, etc.
Un point d'eau est nécessaire dans toutes les sacristies et ce petit relief dans la pierre du vieux mur nous en indique l'emplacement...