Hommage aux enfants de Saint-Illide morts pour la France

Pour rendre un hommage symbolique aux 85 jeunes Miraliers morts pour la France au cours des deux guerres mondiales, nous avons choisi d'évoquer brièvement le parcours de l'un d'entre eux : Henri Aumont.

Henri Aumont est né le 24 octobre 1894, il est le fils du docteur Antonin Aumont, Maire de Saint-Illide depuis 1908 (il le restera jusqu'en 1929 !), et de Jeanne-Antoinette Combes. La famille est originaire d'Argentat en Corrèze.

Henri participe à la petite cérémonie célébrant le départ de la classe 1914, il est même le premier sur la liste des conscrits de la commune !

Il est incorporé au 159e Régiment d'infanterie de Briançon. Ce régiment, qu'on pourrait comparer dans une certaine mesure aux Chasseurs alpins, se caractérise par son équipement "montagnard" : grand béret (tarte) et longue canne (Alpenstock). Les hommes du 159e RI, dont la fière devise est "Toujours lui !", doivent avoir des dispositions pour le ski et les missions en montagne. Peut-être est-ce pour ses qualités sportives qu'Henri a intégré ce qu'on appellera plus tard "le régiment de la neige".

(Attention, l'homme à gauche n'est pas Henri Aumont mais un autre soldat de la classe 14 du 159e RI).

Les événements ne vont malheureusement pas laisser à Henri le loisir de pratiquer les sports de neige. Les débuts de la guerre amènent en effet notre jeune conscrit en Alsace où, dès septembre 1914, il vivra ses premiers combats. Des combats journaliers extrêmement violents qui poussent les hommes à la plus grande sauvagerie.

On dit que lorsque retentit l'ordre "baïonnette au canon !", annonçant l'éventualité d'une lutte au corps à corps, les hommes de troupe sont gagnés par une angoisse presque insupportable...

Dans ces moments terribles, comme Henri a du penser à son village, à ses proches, à la vieille église, à la petite place !!

Ce baptème du feu à peine terminé, le 159e doit se rendre, à l'automne 1915, dans le Pas-de-Calais, c'est là que se déroule du 15 septembre au 4 novembre, la Bataille de l'Artois. L'enjeu de cette bataille est le village de Souchez. Là, dans un déluge de fer et de feu, les armées allemande et française vont se prendre et se reprendre une position bientôt réduite à un tas de ruines. Tirs d'artillerie continuels, assauts, fumée, cadavres, gravas, c'est cette épouvante qu'Henri, sans doute déjà éprouvé, doit affronter.

Un soldat raconte : "Le paysage est si hideux, si hors nature que je me demande si je ne rêve pas : c'est une vision d'infernal cauchemar, le lugubre décor de quelque conte fantastique d'Edgar Poë.
Ce ne sont pas des ruines : il n'y a plus de mur, plus de rue, plus de forme. Tout a été pulvérisé, nivelé par le pilon. Souchez n'est plus qu'une dégoûtante bouillie de bois, de pierres, d'ossements, concassés et pétris dans la boue." (Un hiver à Souchez de Jean Galtier-Boissière)

Mais pour Henri, c'est là que l'aventure va se terminer ... le chaos est tel qu'on ne sait pas précisément quand ni comment il est mort. Assez vite, on annonce sa "disparition" mais ses proches peuvent encore espérer une éventuelle capture par l'ennemi.

"Henri est peut-être prisonnier, là-bas, en Allemagne." C'est à cette idée que se raccrochent probablement sa famille et ses amis. Les mois passent, l'armée fait son enquête, à Saint-Illide l'attente est sans doute insoutenable ; et la nouvelle tombe : Henri est bien mort ... l'armée fixe son décès entre le 26 septembre et le 2 octobre 1915, un peu avant son 21e anniversaire. Son corps n'a pas été retrouvé.

A Aurillac, le 30 janvier 1918, le tribunal civil rend un jugement qui tiendra lieu d'acte de décès. Ce jugement apporte quelques précisions :

"... attendu que le nom du soldat Aumont n’a figuré sur aucune des listes de Français prisonniers en Allemagne communiquées par la voie diplomatique en exécution de la Convention de la Haye, qu’enfin le service des successions militaires a reçu divers objets ayant appartenu au soldat Henri Aumont ... l’ensemble des faits ci-dessus exposés établissent d’une façon certaine la réalité de la mort du soldat Aumont dont le dernier domicile légal était Saint-Illide."

Et, involontairement cruel, le juge ordonne que le jugement à intervenir soit "inscrit à sa date sur les registres de la commune de Saint-Illide et que mention tant du jugement que de sa transcription soit faite en marge des dits registres à la date du décès".

Pensons à Antonin Aumont, Maire de Saint-Illide, inscrivant, dans la solitude de son bureau, la mention confirmant la mort de son fils sur les registres de la commune ...