Poissons de nos rivières

La truite, nous l'avons écrit dans l'article qui lui est consacré, est la reine de nos cours d'eau du Cantal.

Mais d'autres espèces peuplent nos rivières et nos ruisseaux et méritent d'être également citées :

Tout d'abord, et parce que c'est souvent en essayant de les capturer que les enfants font leur apprentissage de pêcheurs, nous parlerons de ces petits poissons que sont les vairons et les goujons.

Le vairon
Le goujon

Le Vairon mesure de 4 à 8 centimètres, grégaire il vit en groupes de nombreux individus ; si la femelle a une couleur argentée et le ventre pâle, par contre le mâle se distingue par un dos brun foncé, le ventre rouge et des traits verts sur les flancs. C'est sur les fonds garnis de petits graviers, à l'abri du courant et peu profonds, leur domaine favori, que la femelle pond jusqu'à un millier d'œufs qui éclosent une dizaine de jours plus tard ; leur durée de vie en l'absence de prédateurs, hélas pour lui très nombreux, est de 5 à 7 ans.

Sa pêche est assez facile, il suffit de disposer d'une canne dont la ligne est équipée d'un petit flotteur et le bas de ligne lesté de 2 ou 3 plombs, terminé par un petit hameçon sur lequel, en guise d'appât, on pique un morceau de ver ou de fromage.

Une autre façon pour les enfants de les pêcher est de poser au fond de la rivière une "bouteille", petite nasse faite de spires serrées de fil de fer galvanisé et dont l'ouverture est constituée d'une sorte d'entonnoir dont la grande ouverture est l'entrée de la bouteille et la petite à l'intérieur de celle-ci; attirés par des morceaux de pain ou des coquilles d'œuf, les poissons entrent dans cette nasse et sont ensuite incapables de trouver la sortie. En relevant périodiquement la bouteille, on peut à la fin de l'après midi avoir une bonne quantité de ces petits poissons et couronner la partie de pêche en faisant le soir une friture, régal des gourmands. Attention, cependant, de prendre la précaution de les préparer en ayant la patience d'enlever les viscères qui donneraient un goût amer à la friture !

A noter aussi que les pêcheurs (les vrais) attrapent les vairons pour en garnir leur bas de ligne et pêcher "au vif" les poissons carnassiers.

Enfin, je me souviens qu'enfant, nous en mettions quelques uns dans un bocal au fond garni de sable et de graviers de rivière et, à la condition de changer l'eau assez fréquemment et de les nourrir, nous arrivions à les garder vivants quelques semaines.

Le Goujon est un petit poisson d'une quinzaine de centimètres de long, vivant en petits bancs sur les fonds sablonneux et graveleux.

Il est caractérisé par une tête massive munie de deux barbillons à la commissure des lèvres, son dos est jaune verdâtre, son ventre blanc bleuté et ses flancs marqués de taches et de bandes sombres. Comme le vairon, il est omnivore et se nourrit de vers , larves, insectes, mollusques, petits crustacés, algues et même végétaux.

Sa présence, comme pour la truite et le vairon, est un indice de l'excellente qualité des eaux dont ils sont les hôtes.

Loche
Barbeau
Chevesne

La Loche au corps également d'une quinzaine de centimètres, de couleur brune jaunâtre parsemée de taches sombres et à la bouche ornée de trois paires de barbillons.

Ce poisson vit sur le fond et a la particularité de rester longtemps immobile au même endroit dans le courant et de n'en partir que lorsqu'un importun s'approche de trop près. Pour cette raison, les enfants essaient de la pêcher avec une fourchette dont la pointe des dents a été aiguisée ; ils s'approchent doucement d'elle le bras tendu et armé de cet engin, lorsque la main est à sa verticale, il faut alors très rapidement plonger la fourchette sur la proie pour tenter de l'embrocher. Inutile de dire que les échecs sont nombreux tant la loche a le plus souvent des réflexes plus rapides que ceux des petits braconniers .

Le Barbeau est le grand cousin du goujon, corps fuselé,un long museau muni de barbillons lui servant à détecter les vers ou les larves d'insectes, des dents pharyngiennes puissantes lui permettant de déguster des écrevisses ou des crevettes d'eau douce. Il a souvent les flancs marqués de reflets dorés et peut atteindre 90 centimètres et peser jusqu'à 9 kilos; sa durée de vie est d'une quinzaine d'années.

Son habitat étant les fonds de graviers et de sable, sa pêche se fait "à la plombée" avec comme appâts des vers, des asticots voire des morceaux de fromage; on le pêche également à "la ligne flottante dérivante"( l'appât est entraîné par le courant et court sur le fond).

Le Chevesne lui ressemble beaucoup mais sa bouche, aux lèvres épaisses, est dépourvue de barbillons; il est caractérisé par un dos brun, des flancs aux écaille argentées et, surtout sous le ventre, par des nageoires pelviennes et anales de couleur rouge vif.

Son poids peut atteindre de 2 à 5 kilos pour une cinquantaine de centimètres.

C'est un poisson très méfiant que les pêcheurs recherchent, comme la truite, pour le caractère sportif de sa capture ; par contre sur le plan culinaire sa chair dure et pleine d'arêtes est sans intérêt.

Voici donc les principales espèces, hôtes des rivières et ruisseaux de notre commune .

Pour être complet, il faut citer les espèces présentes dans les lacs de retenues des nombreux barrages construits sur les cours d'eau d'Auvergne et qui font de cette région un fournisseur important d'électricité d'origine hydraulique.

Le barrage d'Enchanet sur la Maronne, construit à partir des années 1946 sur les communes d'Arnac et de Pleaux, a sa queue de retenue sur l'Etze très près de la limite de la commune de Saint Illide ; en effet le pont, désormais noyé, du Rouffet est juste au dessous du hameau du Couderc, à partir duquel on peut accéder à pied à la retenue( avant que la végétation n'ait envahi la plateforme de la voie de chemin de fer désaffectée, on pouvait en suivant les rails, à partir de la gare de Saint Illide, y arriver rapidement ).

Brochet
Sandre
Perche

Dans cette retenue, ont été introduits des poissons carnassiers comme le Brochet, le Sandre, la Perche ; certains de ces poissons y atteignent des tailles records et font la joie des nombreux pêcheurs qui y ont aussi capturé de très grosses truites ; leur seul regret est la multiplication des Silures, le plus gros poisson d'eau douce d'Europe (certains atteignent 2,50 mètres et pèsent plus de 100 kilos), il a l'aspect d'un poisson-chat, très vorace il consomme une grande quantité des différentes espèces présentes dans ces eaux et monte même en surface pour attraper du gibier d'eau ! Il représente donc un danger pour un bon équilibre halieutique de ces plans d'eau sans parler du risque de le voir remonter et envahir les rivières situées à l'amont ; comme quoi en introduisant des espèces étrangères (le silure est originaire du Danube), l'homme joue les apprentis sorciers et met en péril les équilibres naturels.



Silure

Je terminerai par un souvenir personnel : à la fin des années quarante, un vieil homme propriétaire d'une petite ferme au hameau de Darnis, à l'enfant que j'étais a raconté que dans sa jeunesse alors qu'il fanait un pré situé au bord de la Bertrande, un peu au-dessus du pont de Treize Vents, il s'était approché de la rivière pour se rafraîchir et avait aperçu un gros saumon immobile au milieu du courant ; il l'avait embroché avec sa fourche. Il m'avait alors dit que la présence de ce poisson était certes assez rare mais pas exceptionnelle .

Au tout début du vingtième siècle, les saumons de l'Atlantique remontaient donc encore nos rivières du Cantal pour y frayer !