Les réfugiés du Nord

1914 : Dès la fin du mois d'août, les troupes allemandes venant de Belgique passèrent la frontière et pénètrèrent en France. Ce fut le début d'une débandade pour les habitants du Pas-de-Calais. Evacués de force par l'armée française puis par les occupants allemands qui réquisitionnèrent leurs maisons, ces réfugiés (pour la plupart des femmes, des enfants et des vieillards) fuirent vers les régions du sud et du centre au terme d'un parcours qui les aura parfois amenés en Suisse. Aux Français se mèlèrent également des réfugiés belges (cf photo ci-contre). On pense que 500 000 personnes ont pu être concernées par ces déplacements de populations.

Les deux départements d'accueil furent surtout le Tarn et la Garonne mais le Cantal a également été mis à contribution. Certaines municipalités refusèrent d'aider ceux qu'on traitait trop souvent de "Boches du Nord" et qui, loin de chez eux, avaient bien du mal à trouver du travail et à s'intégrer. Ce ne fut pas le cas de Saint-Illide, qui, fidèle à sa tradition d'accueil, a reçu, en novembre 1914, une trentaine de ces réfugiés.

Antonin Aumont, maire durant toute cette période difficile, était tenu de veiller à leur logement, leur nourriture et leur chauffage. Il devait également rendre des comptes à la préfecture. Son travail nous donne une idée assez précise du profil des familles réfugiées.

NOMS ET PRENOMS
AGE
PROFESSION
DERNIER DOMICILE
NATIONALITE
OBSERVATIONS
Depret
Désiré
48
ouvrier agricole
Wargnies-le-Grand
Française
Tué par un train le 17 février à St Illide
Aline
39
sp
"
"
"
Clarisse
21
ouvrière en boutons
"
"
Toulouse (contrôle du travail)
"
Philomène
20
domestique agricole
"
"
"
Auguste
18
id
"
"
"
Elodie
12
"
"
"
Flore
9
"
"
"
Louis
6
"
"
"
Pauline
4
"
"
"
Joseph
3
"
"
Hiolle
Charles
35
domestique agricole
"
"
mobilisé
"
Louise
27
passementière
"
"
"
Yvonne
9
"
"
"
Albert
4
"
"
"
Alcide
3
"
"
Hiolle
Pierre
31
ouvrier agricole
"
"
mobilisé
"
Angeline
26
passementière
"
"
"
Marcel
9
"
"
Richard
Sophie
24
sp
"
"
"
Angèle
9
"
"
"
Roger
8
"
"
"
Albert
6
"
"
Rufin
Claire
11
"
"
Caupin
Louis
61
mineur
"
Vimy, Pas-de-Calais
"
Alexandre
13
"
"
"
Auguste
10
"
"
Vanderlock
Jules
27
maçon
Néchin
Belge
Toulouse
Depret
Jeanne
née le 10 mai

Cependant, tous les réfugiés n'étaient pas satisfaits d'être affectés dans des petites communes rurales et préféraient les grandes villes. Ce courrier d'Antonin Aumont en est la preuve.

Saint-Illide le 8 novembre 1914

Le Maire de St Illide à Monsieur le Préfet

Monsieur le Préfet,

J'ai l'honneur de vous informer que parmi les réfugiés qui sont arrivés hier à St Illide, deux dames et leurs enfants : Mmes Merveille et Blondel, viennent de me prévenir que le pays ne leur convenant pas, elles repartent à Aurillac.

Logées à l'hospice à leur arrivée, je devais ce matin, les installer dans un logement fort convenable, situé en plein bourg.

La famille qui reste se montre satisfaite de l'accueil qu'elle a reçu.

Le Maire de St Illide

Antonin Aumont

Ironie de l'Histoire, Néchin, la petite ville d'où venait le réfugié belge Jules Vanderlock, est devenu le "refuge" de riches Français cherchant à soustraire leur fortune au fisc. Le plus célèbre d'entre eux étant Gérard Depardieu !