Saint-Illide se prépare à l'arrivée du train (2)

Ca y est ! le train passera bien à Parieu-Bas et le Conseil Municipal de St Illide, en gestionnaire avisé, se préoccupe de l'accès à la future gare.
Songez qu'il n'y avait pas de route pour la desservir en 1880 !
Aussi, le Conseil, le 22 mai 1883, réclame un effort de l'administration, puisque le GC 43 est une route départementale : " Le Conseil considérant que le chemin n°43 va devenir très important à cause de la gare du chemin de fer qui se trouvera à Parieu-Bas ; Considérant que l'ouverture de ce chemin est terminée du côté de St Santin et que le pont sur l'Etze est construit, demande à l'unanimité que l'administration ait la complaisance de faire construire au plus tôt possible, la lacune dudit chemin qui existe entre les villages de Laveissière et de Parieu-Bas."

A l'ouverture de la ligne, le jour de Noël 1891, la route est réalisée et on peut enfin circuler aisément entre le bourg de St Illide et sa gare.

Mais il y a d'autre soucis liés aux gigantesques travaux de réalisation de la ligne. Le Conseil Municipal s'alarme dès le 19 juin 1881. Sans craindre les récriminations de St Cernin qui, en sa qualité de chef-lieu de canton, dispose d'une brigade de gendarmerie, le Conseil sollicite l'installation d'une brigade à demeure : " L'administration est suppliée d'avoir la bonté d'entretenir à St Illide une brigade de gendarmerie pendant tout le temps que dureront les travaux de construction de la ligne du chemin de fer."

Aucune réponse... Aussi, le Conseil réitère sa demande le 10 décembre 1882, de manière plus explicite en des termes plein de bon sens. Tant pis s'il faut dénoncer l'incapacité de la brigade de St Cernin !
" Le Conseil Municipal considérant que les travaux du chemin de fer ont commencé dans la commune et que déjà, près de 300 ouvriers y sont employés ; Considérant que le nombre de travailleurs qui sont occupés sur cette ligne va s'accroître considérablement en 1883 ; que la différence de nationalité excite ou entretient chez eux une rivalité fort préjudiciable aux intérêts du public et peut amener des scènes de désordre qu'il importe avant tout de prévenir. Considérant que le meilleur moyen d'empêcher les rixes, les violences et autres abus que peuvent faire naître une agglomération nombreuse jointe aux sentiments d'une jalousie peu justifiée, est d'avoir sur les lieux un certain nombre de représentants de la force publique ; Considérant que la gendarmerie de St Cernin est éloignée d'environ 18 kms du lieu des travaux, et que dès lors il lui est impossible d'exercer une action préventive suffisante, renouvelle à l'unanimité la demande d'une brigade de gendarmerie qui résiderait à St Illide pendant tout le cours des travaux de construction du chemin de fer."

Les élus de St Illide ne seront pas entendus et pourtant ils n'ont pas exagéré.
Au temps de la construction de la ligne, plusieurs milliers d'ouvriers ont travaillé sur le tracé Bort - Aurillac et certainement plusieurs centaines sur le tronçon Miécaze-Mauriac, le dernier réalisé et, sans doute, le plus difficile techniquement.
"Dès les premières lueurs de l'aube, on entendait sonner le réveil au clairon et c'était l'activité d'une ruche. Tous les corps de métiers étaient représentés, architectes, géomètres, ingénieurs, maçons, artificiers, forgerons, bûcherons, charretiers. On entendait tonner le "canon" du côté de Parieu où, dans la carrière, de puissantes explosions faisaient pleuvoir des grêlons de pierres. Parfois, la terre tremblait sous les pieds avec un sourd grondement là où on forait les souterrains. Enfin, le gros oeuvre fait, on posait les traverses de rails ( 1.500 au km)."

Le recensement de la population de 1886 relève pour St Illide, outre les habitants de la commune, 46 personnes comptées à part, résidents temporaires. Ce sont des Italiens ou des Français, tous travailleurs sur la nouvelle ligne, qui exercent les métiers de mineurs, commis, manoeuvres, tailleurs de pierre, etc.
Quel bouleversement pour les Miraliers !

En même temps, il fallait aussi construire les bâtiments : la gare et tous ses bâtiments annexes ( halle à marchandises, lampisterie, abri voyageurs, etc.) ainsi que les "maisons de garde" des passages à niveau.
On imagine l'effervescence des travailleurs sur la ligne, l'organisation de leur hébergement, doublée de la curiosité des Miraliers qui venaient nombreux contempler avec une admiration mêlée de crainte, l'évolution de ces travaux titanesques...

Enfin, à Noël 1891, tout est prêt pour recevoir le premier convoi.
Les instructions de l'architecte et responsable de la ligne Paul Séjourné qui avait dit à ses équipes "nous n'avons pas le droit de faire laid", ont été scrupuleusement respectées.

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